L’assureur ne peut opposer une exclusion de garantie en cours d’ITT du fait de la survenance d’un congé maternité.
Une pratique est couramment relevée chez les compagnies d’assurance, qui consiste, lorsqu’une assurée bénéficie d’une garantie ITT (incapacité totale de travail), à opposer une exclusion de garantie en cas de survenance d’une grossesse et de mise en place de l’indemnisation du congé légal de maternité.
En d’autres termes, alors que le risque garanti s’est réalisé et que l’indemnisation d’une ITT est en cours, notamment au titre d’une assurance de prêt, l’assureur suspend l’indemnisation de l’évènement lorsque, dans le même temps, un congé maternité survient.
Cette pratique est assez répandue, que l’exclusion fasse l’objet d’une stipulation claire et précise dans la police d’assurance ou non.
Selon les recommandations constantes du défenseur des droits, cette pratique est illégale et discriminatoire.
A titre d’exemple, on peut citer une décision du Défenseur des droits n°MLD/2012-152 aux termes de laquelle Monsieur Dominique BAUDIS a notamment enjoint à l’assureur de modifier sa pratique et d’en justifier.
Les motifs de cette décision sont éclairants et méritent d’être partiellement reproduits:
« le fait générateur du sinistre de Madame Z résulte de la survenue de l’accident en date du 3 décembre 2010, qui est la cause de la réalisation du risque « Arrêt de travail (…)
La survenance du congé maternité n’a produit aucun effet sur la constatation médicale de son incapacité temporaire de travail. Le taux d’incapacité de l’assurée (incapacité totale) n’a pas connu de modification.
L’application de l’exclusion de garantie en raison du congé maternité du 24 janvier 2011 au 3 octobre 2011 revient à priver de tout effet la garantie arrêt de travail sur cette même période, dont le bénéfice était acquis à Madame Z au jour du fait générateur.
Enfin, les termes de la notice (notamment à l’article 8 § 3 Fin des prestations) ne prévoient pas la possibilité de mettre fin ou de suspendre les prestations prévues par la garantie « Arrêt de travail » à la survenance d’un congé maternité. En outre, une telle clause serait manifestement contraire au principe d’interdiction des discriminations fondées sur le congé maternité ou la grossesse.
En conséquence, l’exclusion de garantie ne peut être invoquée par l’assureur, le fait générateur de l’ITT de Madame Z ne résultant pas de son congé maternité (…)
Le principe d’égalité de traitement exige que des situations comparables ne soient pas traitées de manière différente et que des situations différentes ne soient pas traitées de manière égale.
En l’espèce, les situations d’un homme et d’une femme en incapacité de travail médicalement constatée en raison d’un accident de la route sont comparables.
Madame Z a été traitée différemment que ne l’aurait été un homme dans une situation similaire d’incapacité de travail médicalement constatée, et ce en raison de la survenance de son congé maternité.
Si l’octroi de la prestation de la garantie « Arrêt de travail » est acquis à l’homme au jour de survenance de l’incapacité de travail et durant toute la période d’incapacité qui lui a été médicalement reconnue, cette prestation acquise à la femme dans les mêmes conditions ne lui sera garantie qu’en dehors de son congé maternité.
La décision de X (l’assureur) fondée sur la seule survenance du congé maternité a pour effet de traiter moins favorablement les femmes en raison de la grossesse et de la maternité.
En conséquence, la décision de l’assureur X de refuser le bénéfice des prestations de prise en charge des échéances du prêt de son assurée, caractérise une discrimination directe fondée sur le sexe, sur la grossesse ou la maternité, y compris le congé maternité, telle que prohibée par l’article 2 – 3° et 4°de la loi n° 2008-496 du 27 mai 2008 portant diverses dispositions d’adaptation au droit communautaire dans le domaine de la lutte contre les discriminations et contraire à l’article 4 1° a) de la Directive 2004/113/CE du 13 décembre 2004 mettant en œuvre le principe de l’égalité de traitement entre les femmes et les hommes dans l’accès à des biens et services et la fourniture de biens et services.
Ce refus caractérise également une discrimination au sens des articles 225-1 et -2 du Code pénal interdisant le refus de la fourniture d’un bien ou d’un service en raison de la grossesse.
Enfin, il apparaît que la décision de l’assureur fondée sur la grossesse et la maternité de la réclamante entraîne un traitement moins favorable des femmes en matière de prestation assurantielle, contraire aux dispositions de l’article L. 111-7 du Code des assurances (…) »
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On ne peut que recommander de surveiller le bon règlement des indemnités en pareille hypothèse et contester la position de l’assureur qui viendrait à opposer une exclusion de garantie, dans un cadre amiable voire judiciaire.
Dans un tel cas de figure, le cabinet a eu l’occasion d’invoquer la jurisprudence susvisée pour faire valoir la position d’une cliente auprès d’une compagnie d’assurance, afin d’obtenir sa pleine et entière indemnisation au titre de son ITT dans un cadre amiable.
N’hésitez jamais à vous faire accompagner par un professionnel du droit.
Marc Merceron.